formation vtc comme un chauffeur de VTC

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Dominique Méda : « Heureux comme un chauffeur de VTC ? »

Dans sa chronique au « Monde », la sociologue refuse de parer l’auto-emploi de toutes les vertus et plaide en faveur d’une réforme de la régulation des plates-formes.

Chronique « Entreprises ». A quelques semaines d’intervalles, deux arrêts de la Cour de cassation et de la Cour d’appel de Paris ont successivement requalifié en contrat de travail la relation unissant un livreur de repas à vélo à la plate-forme Take Eat Easy et un chauffeur à la plate-forme Uber.

Le 24 janvier se tenait à l’université Paris-Dauphine un colloque consacré aux enseignements à tirer de cette situation, intitulé « Entre l’amendement Taché et l’arrêt Take Eat Easy : de l’autorégulation à la requalification ». Plusieurs intervenants ont suggéré une faible appétence des travailleurs de ces plates-formes pour le salariat. Comme la plupart des jeunes aujourd’hui, soutenaient-ils, les chauffeurs Uber apprécieraient l’autonomie permise par leur statut et n’ambitionneraient en aucune manière de rejoindre la condition salariale, synonyme de subordination. Une thèse également soutenue par une étude américaine, selon laquelle la grande majorité des chauffeurs Uber seraient heureux de travailler pour cette entreprise. Ils apprécieraient particulièrement la flexibilité garantie par leur statut et seraient tout à fait satisfaits de leur rémunération (« An Analysis of the Labor Market for Uber’s Driver-Partners in the United States », Jonathan Hall et Alan Krueger, ILR Review n° 71/3, 2018).

Mais une étude parue dans le dernier numéro de la même revue apporte, sous le titre « Trop beau pour être vrai ? » un démenti cinglant à ces allégations, sous la forme d’une critique acérée de la méthodologie suivie par les deux auteurs, mais aussi d’une remise en perspective historique qui devrait nous inciter à accorder tout le sérieux nécessaire à la question brûlante de la régulation des plates-formes (« Too Good to Be True ? A Comment on Hall and Krueger’s Analysis of the Labour Market for Uber’Driver-Partners », Janine Berg et Hannah Johnston, ILR Review n° 72/1, 2019).

Individualisation des relations

Les auteurs énumèrent d’abord une série de biais méthodologiques qui entachent fortement la légitimité de l’étude précédente, parmi lesquels le fait qu’elle repose sur deux enquêtes réalisées par un cabinet sous contrat avec Uber, le très faible taux de réponse (10 %), l’oubli de questions déterminantes (le nombre d’heures travaillées par les chauffeurs durant une semaine normale…) ou des formulations très floues. Les deux auteures reprennent aussi les calculs montrant que les chauffeurs Uber gagneraient plus que les chauffeurs de taxi et contestent leurs résultats : de nombreuses dépenses incombant aux chauffeurs Uber ont en effet été oubliées.

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