Formation VTC – A Lille

Formation VTC – uber

A Lille, un chauffeur VTC raconte son quotidien : “J’ai pris 10 années en un an de travail”

Une cinquantaine de chauffeurs de VTC (véhicule de tourisme avec chauffeur) ont mené une opération escargot ce mardi matin, à Lille. Ils réclament une meilleure rémunération, une limitation du nombre de VTC et une détaxe sur les carburants.

C’est la troisième manifestation d’ampleur des chauffeurs de VTC depuis le mois de septembre 2018, dans la métropole lilloise. Ce mardi matin, ils étaient une cinquantaine à rouler au pas depuis l’aéroport de Lesquin jusqu’à la gare Euralille, via l’autoroute A1. Au coeur de leur revendication, il y a notamment la question de leur rémunération explique Brahim Benali, représentant d’UVH, le syndicat de chauffeurs VTC, dans les Hauts-de-France:

On a des tarifs indécents. 4,5€ la course minimum, c’est pas possible. On veut une course minimum qui nous permettent de vivre.

Brahim Benali, représentant régional du syndicat UVH de chauffeurs VTC © Radio France – Stéphane Barbereau

Et ces chauffeurs réclament donc un minimum de 10€ net parce qu’il est de plus en plus difficile pour eux de vivre de leur travail.

Jusqu’à 94 heures de travail par semaine

Ahmed est chauffeur VTC depuis un an. Ce père de famille de 50 ans a un bac + 4 en poche. Il a travaillé dans le social pendant 15 ans, comme surveillant dans un foyer pour enfants en difficultés. Il y a 4 ans, il décide de se préparer pour devenir chauffeur VTC. Il met de côté, paie une formation 3 500€ puis décroche sa carte préfectorale il y a un an. Aujourd’hui, il semble usé :

Je vous jure que je regrette amèrement. Si on pouvait revenir en arrière, je toucherais pas à çà.

Ahmed raconte que pour vivre correctement de ce métier, il faut travailler des heures et des heures. A ses débuts, il est allé jusqu’à 94 heures par semaine :

Je cartonnais les week-ends, je travaillais toute la nuit jusqu’au matin. J’étais obligé sinon je ne pouvais pas faire face aux dettes que j’avais.

Les publicités d’Uber pour attirer des chauffeurs

Résultat, ce Lillois ne voit plus sa femme et ses six enfants âgés aujourd’hui de 6 à 17 ans. En se mettant à son compte comme chauffeur VTC, il a emprunté 52 000€ pour payer une Audi A4 Limousine neuve qui fait partie des standards souhaités par Uber, la principale plateforme de chauffeurs VTC. Les banques lui refusant le financement, il s’est endetté auprès de plusieurs membres de sa famille. Au bout d’un an, sa santé en a pris un coup :

Quand on voit que l’on perd ses cheveux, j’ai pris 10 années en un an.

Ahmed raconte la publicité que fait Uber à Pole Emploi avec un simulateur qui promet 2 000€ de revenus pour 40 heures de travail “D’après eux, on va vivre dignement. Pourquoi ils ne disent pas la vérité”, se demande Ahmed. Il enchaîne les courses 60 heures par semaine désormais mais ne touche que 1 600€. Une fois qu’il a déduit son emprunt pour la voiture (à usage exclusivement professionnel), le carburant et les frais d’entretien, il ne lui reste que 500€ pour faire vivre son foyer de 8 personnes. A chaque course, Uber prend une commission de 25%. Sur une course de 20€, le chauffeur touchera au final moins de 9€, une fois déduits la commission Uber et les taxes et frais d’entretien du véhicule.

Un millier de chauffeurs “pirates” à Lille

Ce qui inquiète particulièrement les chauffeurs de VTC, c’est la concurrence déloyale de chauffeurs qui rouleraient avec de fausses autorisations préfectorales. Sur la métropole lilloise, ils représenteraient 40% des 2 200 chauffeurs de VTC selon Brahim Benali :

On a commencé un contrôle dans une application, c’était catastrophique. Il y a des gens qui achètent des fausses cartes à Paris et qui viennent ici ensuite.

Selon ce représentant syndical, la Préfecture du Nord n’aurait pas la possibilité de vérifier sur ordinateur si une carte VTC est vraie ou fausse. Ces chauffeurs “officiels” demandent donc la mise en place d’un numerus clausus, un nombre plafonné de chauffeurs autorisés à rouler dans la métropole lilloise. Un moyen d’éviter la venue de chauffeurs parisiens notamment lors de grands événements sur Lille, comme le concours Miss France, mi-décembre.

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